voici des nouvelles de la nidification en date du 23 juillet.
De : Gilles Gauthier [mailto:Gilles.Gauthier@bio.ulaval.ca]
Envoyé : 23 juillet 2008 14:31
À :
Bonjour,
je suis de retour de l’Île Bylot depuis quelques jours. Mon séjour s’est très bien passé, avec une météo splendide (soleil et chaleur en continue) de la fin juin à la mi-juillet. Les bonnes conditions météo qui ont prévalues au moment de l’arrivée des oies et de la ponte à la fin mai/début juin se sont donc maintenues pour l’éclosion et le début de l’élevage des jeunes. La compilation des données météo récoltées lors du début de saison ont confirmé que la fonte de la neige était une des plus hâtives qu’on ait observée depuis 20 ans à l’Île Bylot. Le pic de ponte a été vers le 9-10 juin et le pic d’éclosion le 7 juillet, environ 2 à 3 jours plus tôt que la moyenne à long-terme. Le nombre d’oeufs par nid était très élevé (3.98, comparé à une moyenne à long-terme de 3.71), tout comme le succès de nidification. À la mi-incubation, seulement 13% des nids suivis avaient été prédatés, ce qui est très peu quand on considère que la majorité de la prédation a habituellement lieu durant la ponte ou le début de l’incubation. Ce succès élevé s’explique par la densité très élevée des nids d’oies dans la colonie et par la forte abondance de lemmings cette année. Lorsque les lemmings sont abondants, les prédateurs (surtout renards et labbes) se concentrent sur les lemmings et délaissent les oies.
L’excellente météo qui a prévalu pendant l’éclosion et le début de l’élevage a probablement aussi favorisée une bonne survie des jeunes dans les premiers jours. Nous avons marqués plus de 2,500 jeunes avec des web-tags durant cette période. Le mouvement des oies vers les sites d’élevage s’est fait très rapidement comparé aux années passées. J’ai fait un décompte rapide des familles présentes dans un rayon de 3 à 4 km du camp principal le 11 juillet, et j’ai dénombré au minimum 2,400 familles (soit environ 12,000 oies si on assume que chaque famille compte 2 adultes et 3 jeunes en moyenne). Un décompte similaire en 2007 (qui était une année tardive) quelques jours après l’éclosion avait donné un peu plus d’une centaine de familles seulement. Cela fait longtemps que je n’ai pas vu une densité de famille aussi élevé si tôt en saison autour de notre camp. Le seul point négatif est qu’à cause du peu de neige au printemps et des faibles précipitations depuis le début de l’été, plusieurs milieux humides étaient s’asséchés à mon départ, ce qui pourrait avoir un effet négatif sur la croissance des jeunes car leur croissance dépend de la présence de plantes de haute qualité dans ces milieux humides.
Globalement, les conditions de reproduction ont été excellente pour l’oie des neiges à l’Île Bylot jusqu’à maintenant. Ces conditions pourraient être généralisées pour une bonne partie de l’aire de reproduction car il semble que tous l’est de l’Arctique canadien (de Iqaluit à Eureka) ait eu un printemps hâtif et on a des indications que le pic d’abondance des lemmings serait à l’échelle de toute la Terre de Baffin.
Il semble donc que toutes les conditions sont réunies pour avoir une excellente production de jeunes cet automne, possiblement la meilleure depuis l’instauration des mesures de gestion exceptionnelles en 1999. L’équipe de baguage des oies part au début d’août pour la dernière étape de la saison. J’aurai des nouvelles d’eux à leur retour vers la fin d’aout pour un pronostic final sur la production de jeunes pour cette année.
Gilles Gauthier
Département de biologie & Centre d'études nordiques